Entre vivre et mourir, il n'y a que toi !
Je marchai sans fin dans les rues. Nous étions Noël ! Je voyais plein de monde ! Des parents qui se baladaient avec leurs enfants qui pleuraient devant les vitrines des magasins de jouets ! Ils criaient, pleuraient devant le jouet de leur rêve sans savoir que demain devant le sapin, ils le découvriraient ! Ils y avaient par-ci, par-là, des chorales d'enfants qui chantaient des chants de Noël. Je m'arrêtais pour les écouter ! Depuis combien de temps n'avais-je pas fêter Noël ? J'enviais tout ces gens, ils étaient assez riches pour s'offrir à manger, un toit ! Je n'avais plus rien de tout ça ! Ma vie se résumait à me balader dans la rue, fouiller dans les poubelles. J'avais tout perdu, je ne sais même plus comment. Il neigeait et j'avais froid, un froid pénétrant, glacial dont il faut se méfiant pour ne pas attraper la mort ! Malheureusement, mon manteau était troué à plusieurs endroits et mes chaussures semblaient peu adapter à la neige ! Je voyais tout ce bonheur qui me dégoûtait. N'avais-je pas le droit au bonheur moi aussi ? Etait-il réservé qu'à ceux qui avait de l'argent ? Je pensais que oui. Je marchai sans savoir où j'allais vraiment. Je ne pensais qu'à marcher.
J'arrivai sur un pont, je m'adossais à la barrière et regardai couler la rivière. Elle paraissait geler à certains endroits. Je réfléchissais, à tout et à rien, à ma vie d'avant, de mon avenir, de toutes mes peines, mes joies, mes souvenirs. Soudain une idée me traversa la tête. Je n'en pouvais plus de cette vie. Pourquoi ne pas en finir car qui se souviendra de moi dans deux jours, dans un an ? Personne car je n'étais personne. J'étais ce qu'on appelle un Sans Domicile Fixe ou un clodo, une personne peut fréquentable. Pourquoi ? La société m'a tout pris, ma vie, mon honneur et ma dignité. Elle te laisse à l'abandon une fois que tu n'étais plus utilisable. Je passai une jambe puis l'autre. Je pris mon inspiration, regarda la rivière, la ville, une dernière fois, toutes illuminée. Je me préparai à sauter quand...
« Ne faites pas ça ! » Je me retournai. Et là, je la vis ! On aurait dit à un ange ! Ses cheveux bruns qui descendaient en cascade bouclée sur ses épaules étaient parsemés de flocon. Son nez, un peu retroussé, semblait un peu rouge. Ses yeux noisette pétillaient de vie ! Elle était habillée simplement, un jean rentré dans ses bottes marrons avec une veste longue en velours marron. Je l'admirai et elle me souriait, ces dents étaient tellement blanches !
« Ne faites pas ça ! répéta-t-elle doucement, je ne sentis aucune panique dans le ton de sa voix.
-Qui êtes-vous et que me voulez-vous ?
-Je ne vous répondrai pas tant que vous ne serez pas de l'autre côté de la barrière !
-Laissez moi ! Je veux en finir !
-Pourquoi ? La vie est tellement belle ! Pourquoi la gâcher ?
-Vous ne savez rien de ce qu'est ma vie !
-Non, c'est vrai ! Mais je voulais juste vous aider !
-Pour vous donner bonne conscience avant Noël ?
-J'ai la conscience tranquille mais je n'aime pas les gens qui choisissent la facilité au lieu d'affronter les épreuves ! Sur ce, joyeux Noël ! »
Elle tourna les talons et fit mine de partir. Je ne voulais pas qu'elle parte.
« Attendez ! » Elle se retourna et revint vers moi.
« Je croyais que je vous embêter !
-Restez, s'il vous plait ! Je m'appelle Arthur !
-Je m'appelle Hannah ! Pourquoi voulez-vous sauter ?
-Pour la même raison que vous avez dite avant ! Je n'ose pas affronter les épreuves ! J'ai trop souffert depuis des années. J'ai tout perdu, je suis à la rue.
-Je ne le savais pas ! Mais je peux vous aider !
-M'aider ? Plus personne ne le peut.
-Si moi !
-Vous ? Pourquoi ferez-vous ça ?
-Parce que j'ai envie de vous aider ! J'ai toujours eu envie d'aider les autres, c'est dans ma nature ! Revenez de l'autre côté, je vous en supplie, ne faites pas cette bêtise ! »
Je la regarda, je crus voir une larme se formait au coin de ses yeux. Je ne voulais pas qu'elle pleure, pas pour un raté comme moi. Je passai mes jambes de l'autre côté. Un sourire s'esquissa sur son visage qui semblait soudain illuminé. Elle me souffla à l'oreille que j'avais fait le bon choix.
« Je vous félicite !
-Pourquoi ?
-Vous avez choisi de vivre ! »
J'avais choisi de vivre pour elle, une inconnue. Mais entre vivre et mourir, il y elle, Hannah, libraire. Ma femme qui m'avait sauver et redonner goût à la vie à moi, Arthur, ex-clodo reconverti en libraire. Cette nuit de Noël, la vie m'a envoyé un message et Dieu, son plus bel ange.