Légende
J'ouvris la porte et restai un moment debout sur le perron, le vent de la mer me caressait. Je commençai à marcher jusqu'à l'église. Je m'arrêtai pour la contempler. Elle était magnifique avec ses pierres grises et froides. La mousse la colorait de jaune ou de vert. Son clocher s'élevait dans la brume de l'automne. Des jardins, égayés l'été par des rhododendrons de couleur rose ou bleu, entouraient l'église. Je rentrai à l'intérieur, et j'admirai ces vitraux. Malgré la grisaille du temps, elle était lumineuse. J'aperçus le prêtre et d'un signe de la main, je le saluai. Les pierres étaient magnifiques et le plafond de bois, assez bas, se mariait à merveille avec elles. Les arcs s'entremêlaient comme dans les dessins celtes. Je quittai ce lieu que j'appréciais et marcha jusqu'à la mairie où j'entendis le bagad, en pleine répétition, jouer une de ces mélodies celtiques qui vous donne envie de chanter et de danser.
J'aimais ma région, ma culture. La Bretagne était la plus belle des Terre, une terre de légendes où il faisait bon vivre. Ah! Bretagne! Ma belle Bretagne! J'aimais ce village, Beuzec Cap Sizun, avec sa vue imprenable des pointes bretonnes, de l'océan. Les jours de beaux temps, on pouvait voir les voiliers sur la mer d'un bleu profond. J'étais fier d'être breton. J'aimais me promener le long des côtes, descendre à Drellen quand la mer était basse, aller pêcher des crabes dans les rochers et les relâcher ensuite et me baigner.
Je continuai doucement ma marche, pris la direction de Lugenez. J'avais pour habitude, le soir, de descendre par le sentier côtier à Drellen pour admirer le coucher de soleil. Je passai devant le dolmen, j'entendis comme par enchantement, le chant des druides. Un chant magique qui donne la force et le courage des guerriers celtes d'antan. Je continuais ma route, je descendis dans la lande, j'admirais la bruyère, les quelques arbres dénudés. Il fallait connaître la route pour descendre dans la petite crique. Je pris le chemin, il était escarpé, étroit et la pente était abrupte. Je la descendis sans trop d'égratignure, j'avais l'habitude.
Heureusement, il n'y avait personne. Je grimpais sur le Rocher Glacé. Il s'appelait ainsi depuis que nous l'avions baptisé avec des amis, il y avait bien longtemps. Je m'assis et continuai à chanter quelques chants bretons. J'attendais le coucher de soleil.
Je le voyais descendre derrière l'horizon, vers les terres inconnues. Le ciel prit une teinte orangée, qui devint rose puis rouge. Le reflet du soleil sur la mer, la colorait. C'était le plus beau des spectacles du monde. Mais je devais rentrer avant que la nuit ne devienne noire comme les ténèbres.
Je redescendit du Rocher Glacé et remonta doucement vers la lande. Je pris un petit détour. Je passa par les champs, les arbres, sur mon passage, faisaient des révérences et le menhir seul me saluait de sa main imaginaire.
Je vis une ombre sur le sol derrière moi, j'eus l'impression qu'elle me suivait. Elle se rapprocha de moi. J'avais envie de courir, de prendre mes jambes à mon cou mais la curiosité l'emportait. Je la laissai s'approcher de moi. Soudain, elle se transforma dans un petit bruit. Ce que je vis... Une chose incroyable qu'on racontait dans les mythes et les légendes.
Devant moi se tenait une fée. Je n'avais jamais vu de fée. Elle était belle. Dans ses yeux brillaient une flamme de malice et une joie de vivre. Son sourire était radieux. Ses cheveux étaient ramenés en deux chignons sur ses oreilles, des boucles tombaient en cascade sur sa robe verte où étaient brodées de petites fleurs roses. Ses ailes semblaient du même vert que la robe. Elle devait être une princesse car elle portait un diadème finement ouvragé. J'étais tombais en admiration devant tant de beauté et de grâce. Face à elle, je me sentais tout petit. Je n'étais qu'un pauvre paysan.
Elle commença à me parler, je l'écoutai avec attention, sa voix était pure comme le cristal. Je savais la chance que j'avais, jamais personne n'avait vu une fée. Elle me disait que son royaume était attaqué par une autre fée, une fée noire, avide de pouvoir. Elle me demandait de l'aider. Je ne savais pas si je devais accepte, je n'étais qu'un pauvre paysan, je ne connaissais rien au monde qui m'entourait, je ne connaissais que mon village et les champs autour et je ne savais pas me battre. Mais la jeunesse et la curiosité l'emportèrent. Je me précipitai chez moi, pris mon baluchon et mon cheval, des crêpes, du pâté et une gourde d'hydromel.
Ma vieille mère ne pouvait comprendre mon élan soudain. Je lui répondis que c'était l'aventure, la jeunesse mais aussi l'amour. Elle me souriait et le laissa partir dans un dernier "Kenavo". Je partis et j'eus du mal à ne pas retenir mes larmes. Je quittais mon village, mes amis et mes souvenirs pour me rendre en pays inconnu.
Ma petite fée qui s'appelait Ry'iel me rassurait et me décrivait son pays. Elle vivait dans une forêt magique. Je lui demandai comment s'appeler son pays, elle me répondit que nous allions à Brocéliande, demeure de la fée Viviane et tombeau de Merlin, remplie d'endroits magiques comme le Miroir au Fée, le Val Sans Retour. Elle me conta des légendes, des mythes et des contes. Je partais donc pour Brocéliande, sur mon cheval accompagné d'une fée.
Je revins dans mon village bien des années plus tard. Ma vieille mère était morte. Plus personne ne me reconnut.
PS: tout les lieux existent. Il se situe en Bretagne à Beuzec Cap Sizun. Le Rocher Glacé est le nom que donné mon père et ses cousins et amis à un rocher tout plat sur la plage de Drellen.
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Sam 10 Fév - 21:58
